Cet endroit est bien connu des Basques car il longe la mer entre Sokoa et Hendaye. Cette corniche surplombe l'océan; elle est composée de flysch qui est un dépôt sédimentaire détritique constitué principalement par une alternance de grès et de marnes.
C'est sur cette Corniche que chaque matin vers 6h30, avant de partir au travail, Amaïa fait son footing. A cette heure-là, hormis les mois d'été, la route est peu fréquentée. Elle court durant 40mn, allant de chez elle jusqu'au château d'Abadia dont elle fait le tour pour emprunter des sentiers boisés qui le contourne, parfois mouillés par les embruns.
Peu avant de rejoindre son domicile, sa vie s'arrête là, sur le bord du petit chemin, une voie sans issue, qui dessert sa maison et celle de quelques voisins. Elle ne se rendra pas à son travail, en ce jour de fin d'hiver, après avoir pris sa douche et son petit-déjeuner. Un assassin lui a ôté la vie.
Qui a pu supprimer cette jeune femme alors qu'aux côtés de son mari, elle menait la vie banale et ordinaire de bien des couples? La police enquête en soupçonnant le mari. Mais dans cette époque troublée, dans le Pays basque des années 80, par de multiples meurtres et attentats, il faut aussi regarder du côté des groupes terroristes.
Extrait
Au détour d'un virage, un ralentissement de la circulation me permet d'apercevoir des voitures garées un peu plus loin sur le côté, dont une équipée d'un gyrophare en action qui barre l'accès à une petite route adjacente. Gagné par la curiosité professionnelle, je me gare sur le bord de la route très fréquentée. Aussitôt, un flic me saute dessus :
Veuillez circuler, Monsieur, il n'y a rien à voir et de plus votre stationnement est gênant.
Tandis qu'imperturbablement je me dirige vers le chemin, je sors ma carte et la lui montre par dessus mon épaule.
Ah, pardon ! Me fait-il dans mon dos Je ne pouvais pas savoir que vous étiez de la maison.
Tu peux me dire ce qu'il se passe ? fais-je, tandis qu'il me suit.
Il y a eu un meurtre ce matin. A présent, la P.J. de Bayonne fait des relevés. La zone est protégée comme vous savez. Mais allez-y, ils sont à deux cents mètres plus haut.
Effectivement, je fais quelques pas et tombe sur mon collègue, et néanmoins ami, André, procédant aux investigations d'usage avec la Criminelle et tout le bataclan. Tout surpris de me voir là, il s'avance vers moi :
Té, salut JB ! Je te croyais à Saint-Sébastien. Les chefs t'ont envoyé en renfort ?
Pas du tout. Je reviens effectivement de « SanSe » mais comme je préfère la Corniche à la Nationale, en passant, j'ai vu de la lumière et me voilà. Si je peux t'aider ! Mais dis-moi avant ce qu'il s'est passé.
Eh bé ! me répond-il avec son accent béarnais, ce matin, un gus, un voisin qui passait là en voiture a vu le corps d'une jeune femme à l'entrée de ce champ. Il s'est arrêté bien sûr et il a pensé qu'elle s'était trouvée mal. En s'approchant pour la secourir, il a reconnu sa voisine dans un sale état. Il est donc retourné chez lui, un peu plus haut, et a appelé le 17. Le commissariat de Saint-Jean est intervenu sur les lieux avec les pompiers, avant que je n'arrive pour commencer mes investigations. La fille était déjà morte mais c'est le voisin qui est parti à l'hôpital car il a fait un malaise.
Et on sait qui c'est ?
Qui ? Le voisin ?
Mais non Ducon, la fille.
Avant de tomber dans les pommes, le gars a eu le temps de nous dire qu'elle vivait avec son mari, un peu plus haut. Elle rentrait de son jogging qu'elle faisait tous les matins de bonne heure avant d'aller à son travail.
Et le mari vous avez pu le contacter ?
Dans un premier temps, il n'était pas chez lui. On l'a retrouvé à son bureau, il est cadre dans une entreprise d'import-export à Béhobie, dans la partie espagnole. Il a été rapatrié chez nous.
Et tu crois que ce meurtre va s'ajouter à notre liste ?
Eh bé ! si tu veux mon avis, ça ne leur ressemble pas.
Tu veux dire ... que ce ne serait pas un coup des Etarras ?
Tandis que je lui posais la question, il hochait de la tête avec véhémence.
Si tu avais vu le corps,... il est évident que c'est un meurtre passionnel. On va attendre les premières investigations et les déclarations du mari ainsi que celles du voisin qui lui aussi sera entendu, ne serait-ce que pour recueillir le témoignage de sa découverte, mais m'est avis qu'il y est peut-être pour quelque chose dans cette histoire. Son évanouissement me semble pour le moins curieux.
Qu'est-ce qu'il avait le corps pour t'emmener à ta conclusion ?
Eh bé ! tout simplement il n'était pas criblé de balles. Un seul coup de couteau dans le cœur a envoyé ad patres cette pauvre petite; je dirais même que c'était un couteau de cuisine. Tu vas pas me dire que c'est la signature de l'ETA. On va bien voir s'ils revendiquent ce meurtre.
Mouais, fais-je l'air dubitatif, on ne peut pas dire qu'ils aient reconnu tous les meurtres qu'on a sur les bras. Bon, mais tant mieux si tu dis vrai, on aura ça de moins à traiter. Et tu as relevé quelque chose d'intéressant ?
Non, pas grand chose. Comme tu vois, l'entrée du champ est très boueux et les sabots des vaches sont mêlés à deux traces qui pourraient être des talons de chaussures de sport féminines. Peut-être les siennes ou celles du meurtrier, lui aussi féminin. On a fouillé les alentours pour voir si l'on retrouvait le couteau mais rien. Ou le meurtrier l'a jeté plus loin, peut-être dans la mer, ou il l'a gardé avec lui. Bon, je crois qu'on a fait le tour ; on se rentre. Salut tout le monde !
Tout en nous dirigeant vers nos voitures, je lui demande :
Mais dis-moi, Dédé, elle a été violée la gamine ?
Il ne semble pas ; elle avait toute sa tenue de sport. Mais j'en saurai plus ce soir ou demain avec les conclusions du médecin légiste. Bon, on se retrouve à la boutique ! Il faut que j'interroge le mari.
Appel à l'achat du livre
Ayant écrit ce roman policier, il va être édité par les Éditions Maïa.
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